La data au cœur du pilotage des infrastructures routières
Une autre vision de l'autoroute urbaine
Quand un territoire anticipe depuis plusieurs dizaines d’années la saturation de son trafic automobile, et que s’accumulent les signes de “thrombose” urbaine, c’est tout l’écosystème économique et l’équilibre de vie du territoire qui sont mis en danger. Dans ce contexte, relancer un projet ancien d’axe autoroutier reliant deux autoroutes existantes, au cœur de l’espace urbain, implique d’aborder le projet non plus avec des “lunettes” du constructeur, mais avec celles de l’expert des fonctions urbaines et des bénéfices citoyens. Quelles sont les règles pour placer la route au cœur d’un projet citoyen ?
1. Qualifier les “fonctions” de l’axe routier
Sa fonction n’est pas de relier un point A et un point B mais de réduire de 45mn à 10mn le temps de trajet de A vers B, c’est faire gagner du temps aux habitants. Seconde fonction réduire l’accidentologie et donc son coût économique et social, troisième fonction, et ce n’est pas le moins “paradoxal”, réduire l’empreinte carbone du territoire et les nuisances pour les riverains des axes préexistants. Enfin c’est reconquérir l’espace en créant de nouvelles surfaces pour des équipements urbains sur les parties recouvertes de l’axe.
2. Se doter de données mesurables pour chaque fonction
Des études socioéconomiques sont lancées pour évaluer les retombées de l’infrastructure sur l’économie de la région (coût économiques des embouteillages, bénéfices de la facilitation des accès aux pôles d’activités), pour mesurer l’impact de la réduction de l’accidentologie (les autoroutes sont moins accidentogènes à trafic équivalent que les axes secondaires), pour identifier les gains environnementaux liés à la baisse du volume d’émission à trafic constant (en l’occurrence 100 000 véhicules jour circulant 10mn au lieu de 45mn) ou au traitement des eaux de ruissellement sur l’axe concerné.
Enfin, la réduction des nuisances sonores oblige à construire des tranchées couvertes, pour recouvrir par exemple comme à Marseille avec la L2, plus de 50% de l’axe. Ces recouvrements permettent d’une part de maximiser la fluidité du trafic, en ajoutant des axes au dessus de l’axe recouvert, ou de consacrer ces couvertures à de nouveaux aménagements urbains importants pour les habitants : jardins, équipements sportifs.
3. Le pilotage
Une autoroute ne fonctionne pas toute seule. Il faut la surveiller et superviser le trafic pour agir et garantir la sécurité des usagers en cas d’accidents ou de bouchons. Le pilotage se fait par un ensemble de systèmes techniques permettant de commander et de contrôler des équipements de recueil de données de trafic, de vidéosurveillance, de détection d’incidents, et de signalisation dynamique notamment. D'autres systèmes assurent la sécurité des biens et des personnes dans les tunnels comme les équipements de ventilation, de fermeture ou les capteurs de qualité de l’air.
Pour garantir une exploitation optimale de l’infrastructure, tous ces systèmes techniques sont eux-mêmes pilotés par un système d'hypervision répondant aux besoins précis de l’exploitant et aux fonctions de l’axe routier. Un axe routier c’est donc aujourd'hui un système d’information doté d’outils de collecte et de remontée de données, d’outils de traitement et de restitution de ces données. Il faut ensuite des outils d’aide à la décision, d’intervention et de pilotage à distance des équipements, permettant la gestion du trafic, sa fluidification et son délestage vers des axes alternatifs.
4. L’anticipation
Assurer les fonctions repose en amont sur l’anticipation, c’est à dire la définition et la mise en production de processus d’exploitation normés. En cas d’accident, l’opérateur est alerté, en vidéo ou par message sur un écran d’alerte. Ces alertes activent automatiquement des propositions de plans d’actions exécutées par l’ensemble des autres systèmes après décision de l’opérateur : signalisation dynamique de la vitesse, allumage des feux de signalisation et des signaux d’affectation de voies, affichage de messages sur des panneaux d’affichage lumineux, diffusion de messages radio, fermeture des barrières d’accès, désenfumage, ...
5. L’intégration technologique et urbaine
Un axe est une composante d’un réseau plus vaste. L’axe routier communique avec et sur les axes qui l’alimentent. Par exemple : la détection des véhicules hors gabarit est effectuée par un dispositif de laser et de caméras positionnés sur les axes en amont. Dès détection du gabarit et lecture de la plaque d’immatriculation, les services sont alertés, un message est affiché sur le panneau à messages variables, avec le numéro de la plaque, demandant au véhicule de sortir. S’il continue sa route, un second portique de détection permet d’afficher un second message exigeant la sortie obligatoire et oriente le véhicule vers une aire d’arrêt dédiée. Un protocole identique est appliqué aux véhicules transportant des matières dangereuses.
L’axe autoroutier urbain est régulièrement relié au réseau routier de la ville. Les entrées/sorties intermédiaires sont alimentées et débouchent sur des carrefours à feux eux-mêmes pris en main par le poste de pilotage.
Un axe autoroutier urbain est certes dédié aux véhicules et aux deux roues motorisées, les modes doux ne sont pas concernés. Néanmoins, dès qu’il y a des tranchées couvertes émergent de nombreuses opportunités de création de pistes cyclables, de larges trottoirs pour piétons. Requalifier l’ensemble des carrefours à feux des échangeurs connexes permet d’y redonner la priorité aux transports collectifs comme les trams et les bus.
Le rôle insoupçonné du bluetooth de votre voiture...
Les équipements de mesure des vitesses des véhicules ont des résultats médiocres lorsqu’il s’agit de mesurer des faibles vitesses de l’ordre de 10km/h. Pour mesurer les déplacements lents, la technologie Bluetooth est pertinente. Comment ? En installant des balises de recueil du signal Bluetooth à l’entrée et à la sortie d’un tunnel. Ces balises vont détecter les voitures ou les équipements mobiles qui ont activés leur signal Bluetooth.
Les signaux de chaque appareil sont captés en entrée et en sortie permettant de calculer très précisément le temps entre les deux balises, donc la vitesse. Ainsi, en cas d’incendie c’est la vitesse des véhicules qui oriente le plan d’actions vers le scénario de ventilation et de désenfumage le plus sécurisé pour les conducteurs.